Brouillard à Gibraltar
- yul2go
- Nov 10, 2019
- 4 min read
Updated: Nov 12, 2019
Il y a quelques années pendant nos vacances en Espagne, on a décidé de visiter Gibraltar. On n'avait pas vraiment d’attentes, on visitait par curiosité, l'opportunité était là. Tout ce qu'on en savait était que c’était un territoire britannique, qu’il y avait des singes et qu’à l’époque où on est allés, il n’y avait pas d’université.
Notre journée a commencé mollo avec une visite dans un pub. Ma dernière visite en territoire britannique remontait à quelques années déjà et j’avais vraiment hâte de retrouver l’atmosphère d’un pub et ma bouche avait hâte de manger un fish and chips bien croustillant. Mais en rentrant dans le pub, c'est mon nez qui en a pris pour son rhume. L’odeur de cigarette qui nous a pogné à la gorge. Ah! Ils ont encore le droit de fumer dans les pubs à Gibraltar… c’est super… On s’est installés à une table bien collante de vieux cernes de bière avec un beau cendrier qui n’avait pas dû être nettoyé depuis la dernière guerre mondiale.
La serveuse est arrivée péniblement jusqu’à notre table en se trainant les pieds. Dans la vie, j’essaie d’aimer les gens et de ne pas les juger parce qu’on ne sait jamais ce qu’ils vivent mais elle, elle m’a pas rendu ça facile. L'air bête, les cheveux tout croches, les traits tirés vers le bas et, pour couronner le tout: les bretelles de brassières beiges qui pendaient de chaque côté! Elle avait l’air d’avoir abandonné la vie en général. J’peux peut-être la comprendre parce que la gravité avait l’air de l’affecter elle plus que tous les gens autour. Juste d’échanger deux phrases avec elle, ça donnait le goût de s’ouvrir les veines. Elle pis un Détraqueur dans Harry Potter, même affaire. Elle est là pour se nourrir de ta joie et ta bonne humeur et elle te laisse rempli de vide et de désespoir.
Une fois la commande passée, j’essayais de focuser sur des pensées joyeuses : une bière, un fish and chips, les vacances! Yay! Mais en attendant notre commande, on a réalisé que le pub était plein de monde comme la serveuse. Du monde qui ont l’air d’avoir abandonné. Pis ceux qui avait pas l’air d’avoir abandonné était accrochées à… des machines à poker. Mettons que mon impression des habitants de la place était faite.
Une fois nos lunchs arrivés, j’étais bien excitée de passer ma fourchette dans le croustillant de mon poisson avec comme objectif de m’en mettre un gros morceau dans la bouche. Ah la délicieuse odeur d’ammoniaque qui en est sortie… Mais bon, le côté positif c’est que ça a donné à mon nez un break de l’odeur de cigarette… Mais tsé, comment tu fais pour avoir du poisson pourri quand t’habites à un endroit qui est littéralement ENTOURÉ d’eau!?!? C’est tu moi qui a trop d’attentes?!? Même les frites étaient dégueulasses! On n’a pas mangé. On a bu nos bières en silence, on a payé et on a crissé notre camp. Pourquoi on n’a rien dit? J’pense qu’on voulait juste sortir de là au plus vite et pu jamais avoir de contact avec la serveuse qui suce le bonheur parce que du bonheur, y’en restait pas beaucoup.
On s’est ensuite dirigés vers le sommet du « Rock » pour aller voir la vue et les singes. Une vue, y’en avait pas à cause du brouillard qui, tu finis par l’apprendre, est toujours pogné autour du rocher. Pis des singes, y’en avait juste trop. Pis j’hais ça les singes. Surtout les maudits singes mal élevés qui te font les poches et qui finissent par sucer ton tube de crème solaire.
Arrivés au restaurant du belvédère, on avait évidemment super faim. J’ai commandé au Détraqueur de service l’item le moins cher sur le menu : un hot dog à 10$. Un triste hot-dog… Un hot-dog frette qui a peut-être déjà vu un Bain marie dans son jeune temps mais j’gagerais même pas 10 piasses là-dessus. Avec une saucisse d’une blancheur fantomatique et un pain tellement sec que c’est clair qu’il est en mission pour t’étouffer. Bref. Comme Gibraltar me donnait le goût d’écourter mon séjour sur cette terre (j’exagère à peine) j’ai mangé le hot-dog en me disant que si je m’étouffais dessus, ce serait une bénédiction. Mais non…
On a donc continué la visite direction « la pointe de l’Europe » pour réaliser que c’était même pas la vrai pointe de l’Europe. Pis ça prend pas la tête à Papineau pour s’en rendre compte, faut juste regarder sur une carte. Tsé quand tu dois t’inventer des attractions parce que t’en as pas pis qu’en plus, les attractions que t’inventes sont clairement une crosse. Me semble que tant qu’à inventer, lâches toi lousse pis inventes quelques choses de l’fun pis qui a de l’allure!
Dans l’autobus du retour, direction la-frontière-au-plus-sacrant, mon cerveau s’est mis en mode scénario catastrophe. Dans ma tête, y’avait un commentateur de nouvelles à la radio qui annonçait un coup d’état à Gibraltar! La frontière était fermée pour une période indéterminée. Du coup, on était pris sur cette grosse roche à manger du poisson pourri servi par une serveuse-détraqueuse jusqu’à la fin des temps. J’en avais des frissons! Mais on a fini par revenir du côté espagnol et, avec un peu de recul, j’ai dû avouer que c’était pas si pire que ça Gibraltar. Mais disons qu’après un séjour en Espagne où la nourriture est délicieuse, où c’est pas cher et où les gens sont rayonnants, mettons que ça clash!
Ça fait des années que l'Espagne louche vers Gibraltar. Ben moi, je leur souhaite de se faire annexer à l'Espagne... Ça peut juste les aider à améliorer leur indice de fun et leur « gastronomie ».

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